Zombies

Zombies en concert, 1981-82, par Miguel Trillo.
De gauche a droite : Miguel Ordoñez, Álex de La Nuez, Bernardo Bonezzi et Tesa Arranz

Un génie incompris, voilà ce qu’était ce gamin, blessé par beaucoup, adulé par les autres. Tesa

Fondé en 1979 par le précoce guitariste et compositeur Bernardo Bonezzi, 15 ans à l’époque, Zombies peut-être considéré comme l’un des groupes séminaux de la Movida. Partageant le local de répétition de Kaka de Luxe, autre groupe pionnier pour lequel il tient parfois la six cordes, Bonezzi devient vite, malgré son jeune âge, une figure centrale du Madrid underground post-transition.

Après quelques fluctuations dans sa composition, le groupe trouve progressivement la stabilité et acquiert une excellente réputation grâce à ses concerts, créant une certaine attente quant à ses débuts discographiques. C’est chose faite avec Groenlandia, single publié en 1980 par RCA, qui devient un hymne instantané de la Nueva Ola. Revisitant la ballade 50’s entre mélodie naïve et ironie stridente, les Zombies distille sur ce premier enregistrement un parfait alliage postmoderne. Esthète monté en graine, Bonezzi s’y affirme comme un song-writer compétent, aux côtés de l’égérie du groupe, Tesa Arranz.

Bernardo Bonezzi et Tesa Arranz

Sorti fin 1980, l’album Extraños Juegos prouve que Zombies n’est pas qu’un groupe à la plastique irréprochable, réussissant à transcrire de façon convaincante un univers décalé, nourri de références aux séries B, à la science fiction, à la littérature (Lovecraft) et à l’Antiquité (Cléopâtre). Le son du disque s’avère particulièrement novateur, façonné par des arrangements mariant à merveille électricité et électronique, mélodie et distorsion, textures sonores et son clair, confinant même à l’expérimentation sur des plages plus instrumentales teintées de surf music.

Plus de trente ans après, on est frappés par la façon dont Bonezzi et sa bande s’amusent à dynamiter la pop grâce à l’électronique, comme dans le morceau titre Extraños juegos, qui alterne couplets doucereux et crescendos bruitistes. A l’époque, Bonezzi confessait penser sa musique pour l’omniprésente boîte à rythmes du groupe ; une déclaration d’intention insuffisamment prise au sérieux. Sa voix de robot maniéré, de même que la gestuelle saccadée de Tesa Arranz, exprimaient sur le mode bizarre, tragi-comique et outré, la même fascination pour l’automatisme et la nouveauté que celle développée par Aviador Dro sur le mode machinique et rétro-futuriste.

Pochette du single Groenlandia,
RCA, 1980

En créant une pop synthétique, hybride et mutante, alors inédite en Espagne, Zombies projetaient incontestablement leur musique vers le futur et rejoignaient les tentatives de groupes comme Roxy Music, Talking Heads ou les B-52’s. Malgré ce coup d’essai, coup de maître, le groupe sera freiné dans ses ambitions par le management insuffisant de RCA et la réticence de Bonezzi à donner des concerts hors de Madrid.

Un second LP, La Muralla China, suivra en 1981. Victime de la répétition et d’une certaine forme d’auto-parodie, il s’avèra décevant, dérivant dangereusement vers une esthétique pop « néo-zazou« . Seules quelques plages, plus atmosphériques, parviendront à éviter le naufrage. Plus arrangeur que rocker, Bonezzi donnera alors l’aventure Zombies pour close. Il se tournera vers la composition de musique de films, devenant notamment le score-man attitré de Pedro Almodovár pour le reste de la décennie.

DISCOGRAPHIE

Groenlandia, RCA, 1980, Single.
Extraños Juegos, RCA, 1980, LP.
Extraños Juegos, RCA, 1980, Single.
No puedo perder mi tiempo, RCA, 1981, Single.
La Muralla china, RCA, 1981, Single.
La Muralla china, RCA, 1981, LP.

PERSONNEL

Bernard Bonezzi (guitare, voix) – Massimo Rosi (basse) – Miguel Ordóñez (boîte à rythmes) – Tesa Arranz (voix, Wood-block) – Alex de la Nuez (guitare).

VIDEO

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